Clément Ier, évêque de Rome

L’absence de sources fiables met au conditionnel l’ensemble de la vie de Clément Ier reconnu comme quatrième évêque de Rome par l'Eglise catholique.
Clément de Rome ou Clément le Romain (Clemens Romanus), Romain peut-être d’origine juive, fils de Faustinus, naquit vers l’an 30 ; il habitait la région du mont Cœlius.
Selon Irénée (+ 202), il fut ordonné prêtre puis sacré évêque par Pierre.
Selon Origène (+ 254), Eusèbe (+ 340) et Jérôme (+ 420), il était le collaborateur de Paul à Philippes : la haute estime dans laquelle Paul le tient est manifeste dans l’Épître aux Philippiens (IV, 3).
Pendant son séjour au Moyen-Orient où il participa en 48/49 au concile de Jérusalem 1, Pierre confia le gouvernement de l'Église, aux trois futurs évêques de Rome : Lin, Anaclet et Clément.

Les dates du pontificat de Clément Ier (92 à 101 selon l'Annuario pontificio) sont imprécises.

Clément aurait été précédé par Lin d’après Augustin (+ 430), et viendrait en quatrième lieu, après Pierre, Lin et Anaclet, si nous en croyons Irénée de Lyon (+ 202) et Eusèbe de Césarée (+ 340) pour lequel Clément fut le troisième évêque des Romains.
Le Journal des Savants (par l'Institut de France, Académie des inscriptions & belles-lettres, 1714) indique : "L'auteur (Irénée, ndlr) donne pour successeur à saint Pierre dans le saint Siège Linus. A Linus il fait succéder Clet, Anaclet ou Anenclet, c'est la même personne sous trois noms différens. Clet fut suivi de Clément..."
"Ayant donc fondé et édifié l'Eglise, les bienheureux apôtres remirent à Lin la charge de l'épiscopat ; c'est de lui que Paul parle dans ses lettres à Timothée ; il eut Anaclet pour successeur. Après Anaclet, le troisième après les apôtres, Clément obtint l'épiscopat." (Irénée, in Adversus haereses, III, III).

Quelques auteurs, notamment Tertullien (+ 225) et Jérôme (+ 420), ont placé Clément immédiatement après Pierre : "c'est que du vivant de cet apôtre et pendant un de ses voyages apostoliques il avait été son vicaire et avait administré pour lui les affaires de son siège". 6

Clément nous est représenté tantôt comme un compagnon des apôtres, tantôt comme un membre de la famille des Césars. En effet, d’après Suétone (+ vers 130) et Dion Cassius (+ vers 235), à la fin du règne de Domitien, le consul Titus Flavius Clemens, accusé d'athéisme (c'est-à-dire de pratiquer les coutumes juives) par son cousin, l'empereur Domitien, fut mis à mort en 95. Certains prétendent qu’il s’agissait de la même personne ; mais il apparaît aujourd'hui que s'il n'y a aucune raison de l'identifier au consul Titus Flavius Clemens (...) il est cependant concevable qu'il ait été un affranchi de la maison de Clemens. 7


92. Pour protéger la viticulture italienne, un édit de Domitien interdit de planter de nouveaux pieds de vigne dans toutes les provinces et impose l'arrachage de la moitié du vignoble (Probus, empereur de 276 à 282, permettra que des vignes soient réimplantées en Gaule). Entre Rhin et Danube, pendant 8 mois, Domitien combat les Sarmates 2, les Quades et les Marcomans (Germains) : une légion est détruite, Domitien reçoit cependant le surnom honorifique de Sarmaticus (Le Sarmatique, autrement dit le vainqueur des Sarmates). Domitien étend la taxe du didrachme 3, l'impôt juif (fiscus judaicus) à tous ceux qui vivent comme des Juifs ce qui inclut les chrétiens 8 ; "On y soumettait soit les prosélytes qui vivaient à la façon des juifs (c'est à dire : les chrétiens, ndlr) sans l'avoir déclaré, soit les personnes qui, en dissimulant leur origine, s'étaient dérobées aux tributs imposés à cette nation". (Suétone in Domitien 12)

93. A Rome, persécution de Domitien contre les Juifs et les chrétiens 9 ; sa cruauté et sa calvitie lui valent le surnom de Néron chauve.

Vers 93-94. Dans ses Antiquités judaïques (XVIII, 63-64), l'historien juif et citoyen romain, Flavius Josèphe (30-100), écrit, dans un court passage (dont l’authenticité est contestée) que : "Vers le même temps (au temps de Pilate, ndlr) survint Jésus, habile homme, si du moins il faut le dire homme. Il était en effet faiseur de prodiges et maître de ceux qui reçoivent avec plaisir les choses anormales. Il se gagna beaucoup de Juifs et aussi beaucoup du monde hellénistique. Christ(os), c'était lui".

94. Selon la légende, le 17 décembre, à Marseille, Lazare, premier évêque de la cité, est décapité. Lazare, frère de Marthe et de Marie, fut ressuscité par Jésus à Béthanie. Selon la légende, chassé de Judée après l’Ascension du Christ, il débarqua, avec ses soeurs, en Provence, aux Saintes-Maries-de-la-Mer. C'est au-dessus de sa sépulture que fut construite l'abbaye de Saint-Victor de Marseille fondée au Ve siècle par le moine Jean Cassien. Au VIIIe ou Xe siècle, pour éviter qu’elles ne soient profanées par les Sarrasins, les reliques de Lazare furent transférées à Autun ; Marseille conserva néanmoins la tête de son saint apôtre. Certains pensent que les reliques que l'on vénère à la cathédrale Saint-Lazare d'Autun ne sont pas celles du Lazare biblique, mais plutôt celles d'un Lazare qui fut archevêque d'Aix vers 408/411. Le tombeau de Lazare, qui aurait été nommé évêque à Chypre par Pierre, est toujours très visité à Larnaka. Lazare et sa soeur Marthe sont fêtés le 29 juillet.

95. Domitien accuse son cousin Flavius Clemens d'athéisme (de pratiquer des coutumes juives) et le fait exécuter ; puis, Domitien accuse sa veuve, Flavia Domitilla, d’impiété et de désobéissance à l’empereur (lequel lui a ordonné de se remarier illico, ce qu’elle a fermement refusé), et la fait déporter sur l'île de Pandateria dans la mer Tyrrhénienne ; Flavius, fêté le 22 juin, et Flavia, fêtée le 7 mai, sont considérés comme des martyrs par l'Église catholique ; Dion Cassius abrégé par Xiphilin, rapporte leur condamnation : "En cette année (95), Domitien mit à mort, avec beaucoup d’autres, Flavius Clemens, alors consul, son cousin, et la femme de celui-ci, Flavia Domitilla, sa parente. Tous deux furent condamnés pour crime d’athéisme. De ce chef furent condamnés beaucoup d’autres qui vivaient more judaïco (à la juive, ndlr) : les uns furent mis à mort, les autres punis de la confiscation. Domitille fut seulement reléguée dans l’île de Pandateria" (Dion, LXVII, 13).

96. Clément évoque les malheurs et les tribulations qui ont frappé inopinément et successivement l'Eglise de Rome 10. Les légions du Rhin et du Danube se mutinent. 18 septembre, Domitien est tué à coups d'épée ; Dio Cassius rapporte (in Histoire romaine LXVII-15) : "Ceux qui l'attaquèrent et qui concertèrent le complot furent Parthenius son cubiculaire qu'il honorait du droit de porter l'épée, Sigerius qui était aussi au nombre des cubiculaires, Entellus caissier général de l'empire en société avec l'affranchi Stephanus. Domitia elle-même, sa femme, non plus que Norbanus, préfet du prétoire et son collègue Petronius secundus n'ignorèrent pas, dit-on, le complot" ; Suétone écrit (in Domitien 23) : "Son meurtre fut accueilli avec indifférence par le peuple... Au contraire, les sénateurs manifestèrent la plus grande allégresse." 18 septembre, le Sénat désigne le sénateur septuagénaire Nerva (Marcus Cocceius Nerva Caesar Augustus) pour succéder à Domitien ; "Nerva fit absoudre ceux qui étaient accusés de lèse-majesté (c'est à dire les chrétiens) et rappela les exilés. Quant aux esclaves et aux affranchis qui avaient dressé des embûches à leurs maîtres ((je lis : ceux qui, en déclarant que leurs maîtres étaient chrétiens, les avaient dénoncés comme coupables du crime de lèse-majesté, donc devant être condamnés à mort, ce qui entraînait la conséquence immédiate d'attribuer une partie importante du patrimoine du maître à l'esclave à titre de prime de dénonciation), il les fit mettre tous à mort. Il ne permit plus aux gens de cette condition de porter aucune plainte en justice contre leurs maîtres : il ne permit pas aux autres d'accuser personne de lèse-majesté ou de judaïsme (ou encore : d'accuser d'être chrétiens ou de pratiquer les rites de l'eucharistie). Beaucoup de délateurs furent condamnés à mort." (Dio Cassius in Histoire romaine LXVIII- 1 et 2)

Vers 96/97. Rédaction de l'Apocalypse (= Révélation) attribuée à l'apôtre JEAN exilé sur l'île de Patmos dans la Mer Egée. Jean et son frère aîné Jacques le Majeur étaient les fils de Zébédée et de Marie-Salomé la Myrophore : Jésus leur donna le surnom de Boanergès (fils du tonnerre) en raison de leur caractère très soupe-au-lait. Jean, le disciple que Jésus aimait (Jean XIII, 23-25), vécut avec Marie après la disparition de Jésus. Jean, patron des théologiens et des écrivains, est fêté le 27 décembre par les catholiques et les 8 mai et 26 septembre par les orthodoxes ; il est symbolisé par un aigle ; il tient une coupe sur laquelle veille un dragon (vouivre ou salamandre) afin d’illustrer la légende du poison mortel qu’il but sans dommage. Selon Tertullien (+ vers 230), il aurait été conduit à Rome en 95 et plongé dans une chaudière d’huile bouillante dont il sortit indemne : il fut alors exilé à Patmos par Domitien. Nerva leva le bannissement et lui permit de résider à Ephèse. D’après la légende, l’apôtre qui ne meurt jamais quitta la Terre dans un nuage de lumière, enlevé dans son église d’Éphèse, vers 101. On lui attribue un évangile et trois Epîtres écrits en grec à Ephèse entre 60 et 90 et l’Apocalypse rédigée à Patmos vers 96/97 pour ranimer l’espérance des chrétiens en proie aux persécutions de Domitien (certains pensent qu'elle a été écrite par un autre Jean). "Il faut avoir l’audace de dire que, de toutes les Ecritures, les évangiles sont les prémices, et, parmi eux, les prémices sont l’évangile de Jean, dont nul ne peut saisir le sens s’il n’a reposé sur la poitrine de Jésus, et n’a reçu de Jésus Marie comme mère. Pour devenir un autre Jean, il faut s’entendre appelé par Jésus comme étant Jésus lui-même : « Voici ton fils. » (Origène Commentaires de Jean).

97. A Ephèse, meurt Apollonius de Tyane, philosophe néopythagoricien, ascète, thaumaturge (Néron l’aurait banni comme magicien pour avoir ressuscité une jeune fille à Rome) et prédicateur de grand renom auquel on éleva des temples et que certains comparèrent à Jésus. Avec le titre de légat impérial propréteur de Germanie inférieure, Trajan gouverne la province et commande l’armée qui s’y trouve, Nerva l’adopte le 28 octobre, le choisit comme successeur, et l’associe immédiatement à son pouvoir comme César. Trajan, dans sa Lettre sur les chrétiens condamne les pratiques courantes sous les mauvais empereurs en général et sous Domitien en particulier et écrit : « Quant aux dénonciations anonymes, elles ne doivent jouer aucun rôle dans quelque accusation que ce soit ; c’est un procédé d’un détestable exemple et qui n’est plus de notre temps ».

98. 27 janvier, mort de l’empereur Nerva à Rome ; Trajan, associé au pouvoir par Nerva le 28 octobre 97, se trouve à Cologne en Germanie où il supervise les travaux du limes entre le Main et le Neckar. 2 février, après les funérailles de Nerva, le Sénat romain confirme Trajan (Marcus Ulpius Trajanus, né en 53 en Espagne dans une famille italienne) comme empereur et l'élit Pontifex maximus et Pater patriae.

99. Trajan fait son entrée à Rome ; il aime les garçons et le vin ; il ajoutera à l'Empire : la Dacie (Roumanie), l'Arménie, la Mésopotamie et l'Arabie. Le roi Oêmo-Kadphisès II, maître du nord de l'Inde, envoie une ambassade à Rome pour demander à l'empereur de prendre les Parthes 4 à revers.

100. Trajan fonde la cité de Thamugadi (Colonia Marciana Traiana Thamugadi), aujourd'hui Timgad dans les Aurès en Algérie, que bâtissent les vétérans de la 3ème légion. En septembre, à sa prise de fonction, le nouveau consul, Pline le Jeune 5, prononce le panégyrique (l'éloge) de Trajan.

Vers 100. Construction du temple du soleil à Teotihuacan (Mexique). Le christianisme, prêché par Thomas surnommé Didyme (Thomas signifie jumeau en araméen, tout comme son surnom, Didyme, qui en est la traduction grecque), s’implante en Perse (principalement en Adiabène, sur la rive gauche du Tigre, aux seins des communautés juives).

100-101. Clément, trop influent sur l'aristocratie romaine et qui refuse de sacrifier aux dieux de Rome, est exilé dans les mines de Cherson en Crimée ; au moment de son arrestation, il aurait renoncé au pontificat et nommé Évariste comme son successeur afin que l'Église ne restât pas sans chef. Selon une oeuvre grecque du Ve siècle : sous le règne de Trajan (98-117), le pape Clément a été déporté au-delà du Pont-Euxin, en Chersonèse Taurique (Crimée) dans les carrières de marbre du désert proche de Cherson (aujourd'hui Sébastopol) où se trouvaient déjà deux mille chrétiens condamnés par l'empereur ; finalement, pour mettre un terme à son apostolat auprès des prisonniers, on lui aurait attaché une ancre au cou avant de le précipiter dans la mer. 13


Les œuvres de Clément Ier

"Clément naquit à Rome et eut pour père Faustinus ; il habitait la région du mont Cœlius. Il fut disciple du bienheureux Pierre. C'est de lui que Paul fait mention dans son épître aux Philippiens, quand il dit : "Je vous prie aussi, vous mon fidèle compagnon, d'aider celles qui ont travaillé avec moi pour l'Evangile, ainsi que Clément et les autres qui ont été mes aides, dont les noms sont au livre de vie." Il partagea la Ville en sept régions, les attribuant à sept Notaires chargés en chacune de rechercher et recueillir avec grand soin les Actes des Martyrs. Lui-même écrivit d'une plume châtiée beaucoup d'utiles ouvrages qui firent honneur au christianisme. Mais comme par sa doctrine et la sainteté de sa vie il convertissait beaucoup de monde à la foi du Christ, l'empereur Trajan le relégua au-delà du Pont-Euxin dans la solitude de Cherson, où se trouvaient déjà deux mille chrétiens condamnés par ce même empereur. Employés à extraire et à tailler le marbre, ils souffraient du manque d'eau, Clément, ayant prié, monta sur une colline qui était proche, et vit à son sommet un Agneau marquant de son pied droit le lieu d'où jaillissait une source d'eau douce où tous éteignirent leur soif. A la suite de ce miracle, un grand nombre d'infidèles se convertirent et vénérèrent Clément comme un saint. A cette nouvelle, Trajan irrité envoya dans ce lieu des gens chargés de jeter Clément à la mer, une ancre au cou ; ce qui fut fait. Or, pendant que les chrétiens priaient sur le rivage, la mer se retira à trois milles, et approchant ils virent un édicule de marbre en forme de temple où, dans un sarcophage de pierre, était enseveli le corps du Martyr ; auprès se trouvait l'ancre avec laquelle on l'avait précipité. Les habitants du pays, émus d'un pareil prodige, embrassèrent la foi chrétienne. Le corps de Clément fut transporté à Rome par la suite, sous le pontificat de Nicolas Ier, et déposé dans l'église de son nom. Une église lui fut aussi dédiée à l'endroit de l'île d'où avait jailli la source miraculeuse. Il vécut dans le pontificat neuf ans, six mois, six jours. En deux ordinations au mois de décembre, il créa dix prêtres, deux diacres, quinze évêques pour divers lieux." 11

On attribue à Clément l'introduction des habits sacrés dans la liturgie.

Clément est considéré comme le premier des Pères apostoliques.

On appelle littérature clémentine l’ensemble des textes apocryphes, composés à différentes époques et attribués à Clément Ier. Cet ensemble comprend : 2 lettres de Clément, les Constitutions apostoliques qui sont une collection de lois régissant l’Eglise, 2 lettres sur la virginité dont l’auteur est peut-être Athanase, évêque d’Alexandrie mort en 373, les Homélies et les Recognitions, et enfin 5 lettres qui font partie des Fausses Décrétales, un ensemble de textes datant du IXe siècle.

La Première Epître de Clément aux Corinthiens, qu'Irénée (Contra haereses, III, III, 3) qualifie de "très puissante" (potentissimas litteras), est considérée comme une œuvre authentique de Clément, écrite vers 95/96. Elle lui permit de rétablir la paix au sein de l'Eglise de Corinthe : "Il est juste de considérer tant de grands exemples, de courber la nuque et de rester au poste que nous assigne l’obéissance. Ainsi ferons-nous cesser nos vaines querelles et parviendrons-nous sans tache au but où nous appelle la vérité, si vous coupez court aux emportements criminels où vous entraînent vos rivalités et entendez l’appel à la paix et à la concorde que vous lance notre lettre (...) Vous donc (Corinthiens) qui êtes à l’origine des dissensions, soumettez-vous aux presbytres, laissez-vous corriger afin de vous repentir et de ployer les genoux de votre cœur. Apprenez à obéir, laissant là votre arrogance et la trop brillante audace de votre langue. Mieux vaut, en effet, pour vous, être petits, mais comptés dans le troupeau du Christ que d’être estimés très haut et de vous voir exclus de l’espérance que nous avons en Lui (...) Par Lui, nous contemplons tel un miroir, le visage limpide et splendide du Père. Par Lui, les yeux de notre cœur s’ouvrent. Par Lui, notre intelligence limitée et obscurci s’épanouit à la lumière. Par Lui, le Maître a voulu nous faire goûter la connaissance immortelle. Lui est lumière éclatante de la gloire du Père (...) Qu’il demeure donc entier, le corps que nous formons en Jésus-Christ ! Que chacun respecte en son prochain le charisme qu’il a reçu. Que le fort prenne souci du faible, que le faible respecte le fort. Que le riche secoure le pauvre, que le pauvre rende grâce à Dieu de lui avoir donné quelqu’un qui subvienne à ses besoins. Que le sage manifeste sa sagesse non par des paroles, mais par de bonnes œuvres. Que l’humble ne se rende pas témoignage à lui-même, mais qu’il laisse ce soin à d’autres. Que celui qui est chaste dans sa chair ne s’en glorifie pas, sachant que c’est à un autre qu’il doit sa continence.(…) Puisque c’est de Dieu que nous tenons tous ces bienfaits, nous devons lui rendre grâce de tout 12 (.) Ayons d'humbles sentiments, mes frères, rejetons tous les sentiments de jactance, d'orgueil, de folie et de colère, et agissons selon l'Écriture. En effet l'Esprit Saint a dit : Que le sage ne s'enorgueillisse pas de sa sagesse, ni le riche de sa richesse, mais que celui qui veut s'enorgueillir s'enorgueillisse, dans le Seigneur, de le chercher, et de pratiquer le droit et la justice. Souvenons-nous surtout des paroles du Seigneur Jésus, lorsqu'il nous enseignait la bienveillance et la patience. Car il parlait ainsi : Soyez miséricordieux, pour qu'on vous fasse miséricorde ; pardonnez, afin qu'on vous pardonne ; comme vous agissez, ainsi on agira avec vous ; comme vous donnez, ainsi on vous donnera ; comme vous jugez, c'est ainsi que vous serez jugés ; comme vous exercerez la bonté, ainsi sera-t-elle exercée envers vous ; la mesure dont vous vous servez pour les autres servira aussi pour vous." 16
Cette lettre constitue l'une des plus anciennes preuves de la primauté romaine.

La Seconde Epître de Clément, qui n’est pas une lettre mais une homélie, est également considérée par certains comme une œuvre de Clément. Le Codex alexandrinus (manuscrit de la Bible grecque datant du Ve siècle) et l’Eglise syrienne la présente comme canonique. Ce texte insiste sur l’importance de préserver le sceau du baptême en vivant dans la pureté dans l’espoir de la résurrection. Le théologien Adolph von Harnack (1851-1930) a cru pouvoir l'identifier avec une lettre de Soter, adressée vers 170, à l'église de Corinthe.

Dans les Constitutions apostoliques, un chapitre, intitulé Comment doivent être ceux qui seront ordonnés, énumère les critères de recrutement du clergé : « Choisissez des évêques, prêtres et diacres dignes du Seigneur, à savoir des hommes pieux, justes, doux, pas avares, amis de la vérité, ayant fait leurs preuves, saints, qui ne font pas acception de personnes, qui sont forts pour enseigner le langage de la piété, et qui se montrent d'une parfaite rectitude à l'égard des dogmes du Seigneur. » (Clément Ier, in Constitutiones apostolicae, livre VII, ch. 31).

Les Deux Epîtres aux Vierges ont été conservées dans un manuscrit syriaque écrit aux alentours de 1470, mais les originaux étaient rédigés en grec. Ils sont présentés comme des extraits d’un sermon dont l’auteur serait un moine palestinien du VIIe siècle et de fragments coptes dont l’auteur serait Athanase. Ces textes considèrent les problèmes soulevés par la pratique du célibat dans l’Eglise et dénoncent les violations de celui-ci. Le fait de l'intervention de Clément en faveur de la virginité n'en reste pas moins appuyé par les témoignages concordants d'Epiphane (H. XXX, 15) et de Jérôme de Stridon (in Contra Jovinian. I, 12).

Les Homélies et les Recognitions furent conservées dans l’original grec et traduites en latin et en syriaque aux environs de 400. Ces textes présentent l’histoire de Clément, de sa conversion par Pierre et de ses voyages. Ils contiennent des instructions aux chrétiens, l’apologie de certaines vertus, et des polémiques contre des thèses gnostiques ou païennes. Les Homélies sont une source d’informations intéressantes sur certaines hérésies des premiers siècles de l’Eglise. On trouve un portrait de Simon le Mage dans les Recognitions.


Le culte de saint Clément Ier

Au IXe siècle, Cyrille, l’apôtre des Slaves, découvrit les reliques du saint martyr, près de Cherson dans une église dédiée à Clément, à l’endroit où le saint Evêque avait fait jaillir une source miraculeuse. Cyrille et Méthode les ramenèrent à Rome et les remirent au pape Adrien II (867-872). Elles sont vénérées dans l'église Saint-Clément dont la légende veut qu'elle ait été érigée à l'emplacement de la maison de Clément à Rome dans le quartier du Mont Coelius ; en 392, Saint Jérôme fait mention de cette église, consacrée à Clément, que fit érigée le pape Sirice (384-399). Au XIe siècle, eut lieu la translation du corps de Saint Cyrille, transporté du Vatican à l'église Saint-Clément. L’église Saint-Clément est aujourd’hui l’un des monuments les plus visités de Rome ; grâce aux fouilles les plus récentes, elle se présente comme le monument chrétien le plus complet de la Rome du premier millénaire (Guidobaldi).

Clément est mentionné dans la première prière eucharistique du Canon de la messe : "Dans la communion de toute l’Eglise, nous voulons nommer en premier lieu la bienheureuse Marie toujours Vierge, Mère de notre Dieu et Seigneur, Jésus Christ, Saint Joseph son époux, les saints Apôtres et Martyrs Pierre et Paul, André, Jacques et Jean, Thomas, Jacques et Philippe, Barthélémy et Matthieu, Simon et Jude, Lin, Clet, Clément, Sixte, Corneille et Cyprien, Laurent, Chrysogone, Jean et Paul, Côme et Damien, et tous les saints."

Saint Clément de Rome est fêté le 23 novembre par les catholiques romains et les anglicans ; le 24, par les églises syriaque orthodoxe, syro-malankare orthodoxe, grecque orthodoxe, catholique syriaque et catholiques orientales ; le 25, par l'Église orthodoxe russe ; le 8 décembre, par l'Église copte orthodoxe. En raison de sa mort en Crimée, Clément est très vénéré dans les pays de l'Est.
Sa mort par noyade, une ancre attachée au cou, en a fait le patron des marins et des bateliers ; son travail forcé dans les carrières de marbre en a fait celui des marbriers.
Saint Clément est représenté en habits pontificaux avec une ancre à ses pieds et parfois avec un agneau ; il porte aussi souvent un livre.
Treize, parmi ses successeurs, ont porté le même nom, ainsi que trois antipapes.
Un dicton est attaché à sa fête : Saint-Clément montre rarement visage avenant.

De nombreuses églises lui sont dédiées.
L’église Saint-Clément des marins de Romo Kirkeby au Danemark, est ornée de modèles réduits d’anciens navires.
Saint-Clément est une paroisse du comté de Les Basques au Québec ; son nom rappelle que le 23 novembre 1873, jour de la fête du saint pape Clément Ier, monseigneur Jean Langevin, premier évêque de Rimouski, ordonna par décret la construction d'une église à cet endroit.
Dans l'église Saint-Clément de Nantes (44), on trouve plusieurs statues et vitraux racontant la vie du saint pontife.
L’Église romane de Saint-Clément-sur-Guye (classée Monument Historique en 1927) est l’une des plus anciennes (fin du Xe siècle) du département de Saône-et-Loire : une bannière et un grand tableau signé de Pérignon, peintre du XIXe siècle, représentent Clément.
L'église Saint-Clément de Cabariot (17), du XIIe s, possède un bas-relief (très mutilé) représentant le martyre du pape.
L'Église Saint-Clément d'Arpajon (91) est bâtie à l'emplacement d'une première église érigée au Xe siècle.
Dans l'Eglise Saint-Nicolas du Vivier-sur-Mer (35), sur l'autel sud consacré à saint Clément, patron des marins, se trouve un magnifique tableau et un cadre du XIXe siècle, anonymes, qui le représentent.

Vingt-et-une localités de France se nomment Saint-Clément (la plupart en l'honneur du saint pape Clément).


Notes
1 Le concile de Jérusalem (Actes 15,1-29), dirigé par Jacques le Juste, le frère du Seigneur, et auquel participa Pierre, décida que les païens devenus chrétiens devront seulement s’abstenir des souillures des idoles, de la fornication, des chairs étouffées et du sang : ils étaient donc dispensés de la circoncision et, plus généralement, libres à l’égard de la loi mosaïque.
2 Les Sarmates, peuple de nomades de l'Antiquité, parlaient une langue indo-européenne (indo-iranien) et vivaient, selon Hérodote, au Ve siècle av. J.-C. en Russie méridionale. Les Geloni et les Setucii leur étaient apparentés. Au nombre des tribus sarmates figuraient les Alains, les Roxolans et les Iazyges. Au IIIe siècle av. J.-C., ils soumirent les Scythes des grandes plaines du nord de la mer Noire et étendirent leur territoire de la mer Baltique à la mer Noire et de la Vistule à la Volga. Les Sarmates furent vaincus par l’empereur Marc Aurèle en 176.
3 Le paiement de la taxe du didrachme fut imposé aux Juifs (même à ceux de la diaspora) par l'empereur Vespasien, après la destruction du Temple de Jérusalem en 70, pour financer le temple de Jupiter Capitolinus à Rome.
4 Les Parthes étaient un peuple de cavaliers indo-iraniens, établi entre la Caspienne et la mer d’Aral, dans une province de l’Empire séleucide appelée Parthyène. Les Parthes, dont le nom proviendrait de Parthaya signifiant en iranien combattant, cavalier, pourraient avoir fait partie des Parni, l’un des groupes composant les Dahae (peuple scythe). Pour d’autres, le mot Parthe signifiait banni dans l'idiome scythique parce que leur tribu avait été chassée de Scythie.
5 Pline le Jeune (Caius Plinius Caecilius Secundus), écrivain latin (62-113), était le neveu et le fils adoptif de Pline l’Ancien. Il fut questeur (91-92), tribun de la plèbe (93-94), préteur (95-96), préfet du trésor public militaire (96-98), préfet du trésor (98-100), puis devint consul en 100, année où il composa le Panégyrique de Trajan. Curateur du Tibre (100-101), puis augure, il fut nommé vers l’an 111 gouverneur de la Bithynie.
6 Dictionnaire historique ou Biographie universelle des hommes qui se sont fait un nom par leur génie, leurs talents, leurs vertus, leurs erreurs ou leurs crimes, depuis le commencement du monde jusqu'a nos jours, François-Xavier Feller
7 Dictionnaire des Papes, John N.D.Kelly, éd. Brépols, 1994
8 http://membres.lycos.fr/tiberius13/flaviens/chrono/domitie1.htm
9 Wikipedia, 93 ; http://membres.lycos.fr/tiberius13/flaviens/chrono/domitie1.htm ; http://www.christ-roi.net/index.php/Domitien ; http://www.histoire-christ-gnose.org/chronologie.htm
10 home.scarlet.be/rupture/bi_frame.htm
11 L'Année Liturgique, Dom Guéranger, 1841 à 1866, Abbaye Saint Benoît de Port-Valais
12 Epître de Clément de Rome, 38, Les Pères apostoliques, Cerf, Foi vivante, 1991, p. 98-99
13 Il existait à Rome une tradition du martyre de saint Clément affirmée par Rufin, les papes Télesphore (+ 136) Zosime (+ 418) et le sixième concile de Vaison (442) ; les actes de son martyre sont une oeuvre poétique grecque du V° siècle.
15 http://missel.free.fr/Sanctoral/11/23.php
16 http://www.news.va/fr

Sources


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Liste des papes


Auteur : Jean-Paul Coudeyrette
Référence publication : compilhistoire.fr ; reproduction interdite sans l'autorisation de l'auteur.

Date de mise à jour : 14/03/2024

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