LES JESUITES.
La Compagnie de Jésus.

Ad majorem Dei gloriam (Pour la plus grande gloire de Dieu) est la devise de la Compagnie de Jésus, dont la finalité principale est l'apostolat, que les jésuites exercent par le biais de la prédication, de l'enseignement ou de toute autre activité selon les besoins ponctuels de l'Église.
Dès son origine, l'Ordre a fait de l'enseignement sa spécialité et a contribué grandement à l'érudition tant en théologie que dans les matières séculières.
A la fois ordre de clercs réguliers et ordre mendiant, c’est le seul ordre dispensé de la récitation en commun de l’office.

Tout candidat qui souhaite intégrer l'ordre, surtout s'il aspire à être prêtre plutôt que frère (coadjuteur temporel), doit suivre une période de formation considérablement plus longue que celle requise pour entrer dans le clergé séculier ou dans d'autres ordres religieux. Après deux années de noviciat passées dans la solitude et consacrées à la prière, l'aspirant prononce des vœux simples de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Puis il étudie pendant deux ans les matières classiques et pendant trois ans la philosophie, les mathématiques et les sciences physiques. Il se voue à l'enseignement pendant quelques années avant de retourner pendant trois ans à ses études, portant sur la théologie. Son ordination sera alors prononcée. Suivent une quatrième année d'études théologiques et une année de retraite et de prière, avant que le candidat n'achève sa formation, devenant ainsi coadjuteur ou profès. Aux vœux religieux, les jésuites ajoutent le vœu spécial d'obéissance au pape. Les coadjuteurs prononcent des vœux perpétuels simples de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Les profès, pour leur part, font les mêmes vœux mais ces derniers revêtent un caractère solennel. Ils s'engagent aussi à aller là où le pape les enverra et prononcent cinq vœux simples ; au titre de l'un de ces vœux, ils renoncent à toute fonction ecclésiastique en dehors de leur ordre, à moins que cela ne leur soit expressément demandé.
« Et chacun se persuadera que ceux qui vivent sous l'obéissance doivent se laisser mener et diriger par la divine Providence au moyen des Supérieurs, comme s'ils étaient un cadavre (perinde ac cadaver, ndlr) qui se laisse mener n'importe où et traiter n'importe comment, ou comme le bâton d'un vieillard que celui qui le tient dans sa main utilise n'importe où et pour n'importe quel usage auquel il voudrait l'employer. C'est ainsi, en effet, que celui qui obéit doit exécuter allègrement tout ce à quoi le Supérieur veut l'employer pour aider tout le corps de l'Ordre, en tenant pour certain qu'il se conformera par là à la volonté divine, plus que par toute autre chose qu'il pourrait faire en suivant sa volonté propre et un jugement différent ». (Constitutions, 6ème partie, chapitre 1, 547)
« Je ne dois pas m’appartenir, mais être à celui qui m’a créé et à son représentant, pour me laisser mener et gouverner comme une boulette de cire se laisse tirer par un fil ». (Dicté à Jean-Philippe Vito par Ignace de Loyola à la fin de sa vie)

La Compagnie est dirigée par un préposé général (surnommé le pape noir), résidant à Rome, élu à vie par la Congrégation générale constituée de représentants des différentes provinces (222 délégués dont 84 provinciaux en 1995). La Compagnie est divisée en 10 assistances regroupant 85 provinces, 16 régions dépendantes et 6 régions indépendantes.

Le terme de jésuite est antérieur à la fondation de la Compagnie de Jésus. Pour les théologiens du Moyen Âge, le chrétien, après sa mort, deviendrait un jesuita, c’est-à-dire un autre Jésus. Mais dès le début du XVIe siècle, le mot prit dans les pays germaniques une coloration péjorative. Appeler quelqu’un jesuita équivalait à le traiter de faux Jésus.



PETITE HISTOIRE DE LA COMPAGNIE DE JESUS

Le 15 août 1534, au petit matin, dans la chapelle dite des martyrs en l’église Saint-Pierre de Montmartre, Ignace de Loyola, François-Xavier (de Navarre), Pierre Favre ou Lefèvre (de Savoie), trois autres espagnols, Diego (Jacques) Lainez (qui succèdera à Ignace à la tête de l'ordre), Alphonse Salmeron et Nicolas Bobadilla, plus Simon Rodrigués, un gentilhomme portugais, tous étudiants en théologie, décidèrent de fonder une institution destinée au salut des âmes et firent vœu de se vouer à l'évangélisation et de consacrer leur vie au service du pape, jetant ainsi les bases de ce qui deviendra la Compagnie de Jésus. Ce vœu solennel fut scellé par une messe célébrée par Pierre Favre ordonné prêtre le 30 mai.
Trois Français rejoignirent le groupe : le savoyard Claude Jaÿ, le picard Paschase Broët et le provençal Jean-Baptiste Codure.
Le 24 juin 1537, ceux qui n'étaient pas encore prêtres reçurent l'ordination presbytérale à Venise.
En novembre 1538, les compagnons reçurent, à Rome, l'approbation orale du pape Paul III.
Par la bulle Regimini militantis Ecclesiae du 27 septembre 1540, Paul III donna officiellement à l'association le titre d'ordre religieux : la Compagnie de Jésus était née.

Ignace de Loyola
Ignace de Loyola (Iñigo Lopez de Oñaz y Loyola) naquit en 1491 au château de Loyola, dans le Guipúzcoa (Pays basque espagnol). Il fut, dans sa première jeunesse, page à la cour de Ferdinand et Isabelle de Castille. Il entra en 1517 au service d'Antonio Manrique de Lara, duc de Najera. En 1521, il fut sérieusement blessé par un boulet en défendant Pampelune assiégée par les armées de François Ier. Pendant sa convalescence, il lut la Légende dorée de Jacques de Voragine ainsi qu'une Vie de Jésus-Christ et décida d'abandonner son existence de gentilhomme pour s'adonner à la vie spirituelle. Dès sa guérison, il se rendit en pèlerinage, le 15 août 1522, à l'abbaye de Montserrat près de Barcelone et vécut une expérience spirituelle importante. Devant l'autel de la Vierge, il abandonna son épée et renonça à ses ambitions militaires. Il se retira dans une grotte à Manresa, en Catalogne, y mena une vie austère de jeûne, de mortifications et découvrit sa véritable vocation, de nature apostolique. Il semble qu'il commença alors la rédaction de ses Exercices spirituels en s’inspirant des Exercices pour la vie spirituelle de l’abbé Garcia de Cisneros (1500). Les Exercices spirituels, utilisés dans la formation des jeunes jésuites, constituent le modèle sur lequel se fondent la plupart des retraites spirituelles de l’Eglise catholique. Dix mois plus tard, en 1523, après avoir séjourné un mois à Barcelone, il partit en pèlerinage à Jérusalem. De retour en Espagne en 1524, Ignace décida de poursuivre ses études à Barcelone. Il fréquenta l'université d'Alcala de Henares et l'université de Salamanque de 1526 à 1527. Soupçonné de magie et considéré comme un illuminé, il fut emprisonné par l'Inquisition et interdit de prêche jusqu’à ce qu’il ait effectué 4 années d’études. En février 1528, Inigo arriva à Paris où il reprit ses études à la base au collège Montaigu. En octobre 1529, il s'inscrivit au collège Sainte-Barbe. Reçu bachelier en décembre 1532, il devint Maître ès Arts en mars 1533. En 1534, dans l'église Saint-Pierre de Montmartre, il posa, avec six compagnons étudiants, les bases de ce qui deviendra la Compagnie de Jésus.


Lorsque Ignace de Loyola constitua son groupe, il voulait surtout partir en Terre sainte afin de convertir les musulmans, mais la guerre avec les Turcs Ottomans rendit impossible ce voyage. Alors, les membres de l'ordre soumirent une proposition au pape : ils s'engagèrent à partir comme missionnaires là où le pape les enverrait : « Quelle que soit la province où ils (les papes) voudraient nous envoyer, nous serons tenus d’accomplir notre mission [...] soit qu’ils nous envoient chez les Turcs [...], soit chez n’importe quels hérétiques, schismatiques ou fidèles ».
En 1541, Paul III concéda à la Compagnie de Jésus la petite église de Santa Maria della Strada, à Rome. À Pâques, Ignace devint le premier général de la Compagnie. En 1542, avec ses compagnons, il fit sa profession dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs à Rome.
Le 14 mars 1543, la bulle Nobis injuctum de Paul III accorda à la Compagnie de Jésus la faculté de recevoir dans son sein tous ceux qui se présenterait et dont elle aurait étudié la vocation ; par cette même bulle, le droit de faire des constitutions était laissé à la société.
Le 31 juillet 1548, la bulle Pastorasis officii de Paul III approuve les exercices spirituels d'Ignace de Loyola.
Le 21 juillet 1550, la bulle Exposit Debitum de Jules III confirme la Compagnie de Jésus.
Le 23 février 1551, Ignace inaugura le Collège romain (maintenant Université grégorienne).
Ignace administra les affaires de la Compagnie qui se développait très rapidement et en rédigea les Constitutions qui furent complétées après sa mort le 31 juillet 1556.
Mis au rang des bienheureux en 1609 par Paul V, Ignace de Loyola fut canonisé par Grégoire XV le 12 mars 1622 en même temps que François-Xavier et Thérèse d'Avila. Il est vénéré comme le saint patron des retraites.

La Compagnie de Jésus jouera un rôle essentiel dans l’Eglise et mènera un grand travail d'évangélisation missionnaire.

François-Xavier (1506-1552), sixième enfant de Jean de Jassi, est né au château de Xavier près de Pampelune ; patron des Missions, il installera des missions en Inde (à Goa où il débarque le 6 mai 1542) et au Japon où il mettra pied, le 15 août 1549 ; d'autres seront établies en Chine (à partir de Macao) où, le 24 janvier 1601, Matteo Ricci (1552-1610) sera le premier missionnaire à être admis définitivement à Pékin.

La correspondance des missionnaires jésuites constitue un témoignage (tant ethnologique, historique que scientifique) unique et d’une valeur exceptionnelle, dont l’influence est notable sur la philosophie des Lumières (sur Voltaire en particulier). Cette correspondance a été rassemblée et publiée en France de 1702 à 1776 sous le titre Lettres édifiantes et curieuses.

Les jésuites s'impliqueront énormément dans la Contre-Réforme, construisant écoles et collèges dans toute l'Europe.
Pendant 150 ans, ils domineront l'enseignement européen.

L'histoire de la Compagnie de Jésus est marquée par la montée régulière des hostilités qu'elle a suscitées, surtout dans les pays catholiques, et plus particulièrement au Portugal, sous le marquis de Pombal.
C’est que les chefs d'État et gouvernants de ces pays ne supportaient pas l’entier dévouement des jésuites à la seule autorité du pape, et le clergé leur reprochait leur engouement trop ouvertement affiché pour les réformes ecclésiastiques, ainsi que leur art subtil de l’inculturation dans les pays de mission (Querelle des rites).
À un moment ou à un autre de leur histoire, chaque pays d'Europe a expulsé l'ordre.

Pierre Canisius
De 1555 à 1558, des catéchismes à usage populaire, préparés par le jésuite allemand Pierre Canisius (1521-1597), sont publiés.
Ce Hollandais, né à Nimègue dans une famille catholique, au temps où la Réforme se répand dans toute l'Europe du nord, part compléter de solides études à Cologne.
La rencontre avec Pierre Favre, compagnon d'Ignace, le confirme dans sa décision de se faire prêtre (1546), et le détermine à entrer dans la Compagnie de Jésus. Il passera sa vie à lutter contre l'influence de Luther : il prêche, il traduit les Pères de l'Eglise, il rédige un petit catéchisme : Summa doctrinae christianae.
Les Pères du concile de Trente font appel à ses compétences théologiques.
Si Pierre combat la Réforme, il est bien conscient des faiblesses de l'Eglise catholique. Il est convaincu que le renouvellement de l'Eglise doit passer par la formation du clergé et la lutte contre l'ignorance.
Pierre introduit l'usage de l'imprimerie - cet instrument de la contestation - dans l'Eglise et en use lui-même abondamment.
Il fonde 13 communautés jésuites.
Docteur de l'Eglise en 1925, il est le second apôtre de l'Allemagne.
Croyez ceci : si l’on a dans le cœur l’amour du Christ crucifié, alors en cette vie, rien n’est vraiment pénible. Quand vous voyagez pour lui, il ne vous manquera point, lui qui est le guide fidèle, le gardien de vos pas. Il est celui qui n’abandonne jamais les siens à l’heure où il les laisse provisoirement en butte au mépris du monde. (Pierre Canisius – Lettre à un ami de Hollande)

Les jésuites réalisent des crèches d'église, faites de petits personnages de plâtre, notamment celle de Prague, en 1562, qui figure parmi les plus anciennes connues.

Le 15 juillet 1570, dans les îles Canaries, près de Las Palmas, Ignace Azevedo et ses 39 compagnons jésuites sont massacrés par des pirates calvinistes.

Le 13 juillet 1572, les jésuites débarquent au Mexique.

1578 : les jésuites en Chine.
Ordonné prêtre en 1582, le Père Matteo Ricci (1552-1610) part en 1584 pour la Chine – exactement Macao – où se trouve l’objectif missionnaire des jésuites depuis la fondation de l’ordre.
En 1589 il se rend à Shao Zhou, dans la province de Guang Dong.
Après avoir conquis, avec grande fatigue, la mission chinoise et après mille tentatives manquées, le père Ricci réussit finalement à se rendre à Pékin le 24 janvier 1601 pour se présenter à la cour impériale des Ming.
Matteo Ricci permet à l'Europe d'identifier la Chine comme étant le Cathay décrit par Marco Polo. Il introduit en Chine la géométrie sphérique, affine la cartographie de cette région du monde et présente à l'empereur une mappemonde.
Il construit la fameuse église, dédiée à l’Immaculée Conception, la cathédrale de Pékin.
Il meurt à Pékin le 11 mai 1610. Pour rendre hommage à ce grand homme, l’Empereur Wan Li donne un terrain pour l’enterrer, au centre de Pékin. 1
Dans la religion populaire chinoise, Matteo Ricci est vénéré comme maître des horloges et protecteur des horlogers.

En 1584, des prêtres jésuites sont arrêtés et suppliciés pour avoir conspiré contre Elisabeth d'Angleterre.

En 1588, à Cuenca, le jésuite espagnol Luis de Molina (1535-1600) publie Concordia liberi arbitrii cum gratiae donis où il s’efforce de concilier avec la liberté humaine la prescience de Dieu et la nécessité de la grâce.
Sans nier le caractère surnaturel de la grâce et la toute-puissance divine, Molina insiste sur l’effort humain.
A travers Molina, l’Eglise catholique cherche à concilier le libre arbitre et la grâce [chaque fois que nous nous efforçons de faire le bien par nos seules forces naturelles, le secours de la grâce nous est donné pour le faire de la manière qui convient pour le salut], alors que Jansenius veut revenir à une stricte interprétation de Augustin : « Le libre arbitre ne peut vouloir que le mal. La grâce doit être constante et irrésistible et nous déterminer de l'intérieur à vouloir le bien [...] Ce n’est pas en vertu de nos mérites que la grâce de Dieu est donnée aux enfants et aux personnes en âge de raison... Elle n’est pas donnée à tous les hommes, et ceux à qui elle est donnée ne l’obtiennent pas d’après le mérite de leurs œuvres ni d’après celui de leur volonté... »
Les dominicains espagnols et les jansénistes s’opposeront aux molinistes.
Les papes Clément VIII et Paul V organiseront des congrégations pour analyser, et éventuellement condamner, le molinisme : elles aboutiront à un non-lieu.

En 1591, la peste ravage Rome. Le jésuite, Louis de Gonzague, qui fut l'élève de Robert Bellarmin, se dévoue auprès des malades et meurt, pestiféré à son tour, à 23 ans, dans l'allégresse en s'écriant : "Quel bonheur !"

1594
Le 24 décembre, Jean Châtel (19 ans), ancien élève des jésuites [pendant 2 ans à Paris au collège de Clermont (futur Louis le Grand)], blesse Henri IV à la lèvre d'un coup de couteau : 37 jésuites du collège sont arrêtés (un est banni ; un autre, le Père Guignard, est pendu en 1595, sur la place de Grève, pour avoir écrit une apologie du régicide).
Le 29 décembre, le Parlement de Paris décide d’expulser les jésuites (la décision est peu appliquée).

1597
Le christianisme, interdit au Japon depuis 1587, est devenu clandestin. En février 1597, vingt-six chrétiens sont arrêtés : des jésuites, des franciscains, des laïcs tertiaires de saint François, des enfants de choeur ; parmi eux, Paul Miki, premier jésuite japonais et prédicateur passionné. On les promène de ville en ville, pour l’exemple, pour dissuader ceux qui seraient tentés d’embrasser la religion interdite. Torturés, les martyrs continuent à prêcher et à chanter pendant leur supplice, avant de finir crucifiés sur une colline proche de Nagasaki, face à l’Occident, comme pour narguer cet horizon d’où venait le christianisme.
"Je vous déclare qu’il n’y a aucune autre voie de salut que celle que suivent les chrétiens. Puisqu’elle m’enseigne à pardonner aux ennemis et à tous ceux qui m’ont fait du mal, je pardonne de grand cœur au roi et à tous les auteurs de ma mort. Je les prie de bien vouloir recevoir le baptême chrétien." (Dernières paroles de Paul Miki) 8

Robert Bellarmin
Roberto Francesco Romolo Bellarmino (Robert Bellarmin) naquit à Montepulciano, en Toscane, le 4 octobre 1542. Fils d’un magistrat local et neveu du pape Marcel II, il entra à la Compagnie de Jésus en 1560 et fut ordonné prêtre en 1570. Après avoir été professeur de théologie à Louvain, on lui confia en 1576, l’enseignement de la théologie dite de controverse au Collège romain. Dans Disputationes de controversiis fidei christianae (Débats sur les controverses de la foi chrétienne, 1586-1593), Bellarmin réfuta point par point les différentes professions de foi protestantes. Il devint le conseiller théologique du cardinal Cajétan alors légat du pape Sixte V en France (1589), puis du pape Clément VIII qui le nomma cardinal en 1599 après qu'il eut publié le Grand et le Petit Catéchisme en 1597.
C'est à son initiative que fut révisée la Vulgate de saint Jérôme. Bellarmin, nommé archevêque de Capoue en 1602, démissionna en 1605 pour travailler à la Curie romaine auprès du pape Paul V qui le nomma préfet de la Congrégation des Rites. Il négocia des traités et des dossiers importants, dont l'affaire Galilée.
En 1610, il publia De potestate Summi Pontificit in rebus temporalibus (Du pouvoir du Souverain Pontife dans les affaires temporelles).
Ayant donné tout son argent pour le secours des pauvres, Bellarmin se retira en août 1621 à Saint-André au Quirinal où il mourut, pauvre, le 17 septembre.
Benoît XV proclamera l'héroïcité de ses vertus (1918) ; il sera béatifié (1923) et canonisé (1930) par Pie XI qui le déclarera docteur de l'Eglise universelle en septembre 1931.

En 1599, Pedro da Fonseca, jésuite, auteur de Commentaires d’Aristote, qui chercha à concilier le libre arbitre et la prédestination, meurt à Lisbonne.
Dans Six livres de discussions magiques, le jésuite Martin Del Rio affirme que, en matière de sorcellerie, tous les témoignages sont acceptables pour soumettre un suspect à la torture.

En 1601, François Garasse entre dans la compagnie des Jésuites. Il s'adonne à la prédication pour lutter contre le libertinage et l'hérésie : il entretient une querelle avec l'Université de Paris qu'il juge pleine de jansénistes prônant le gallicanisme.

En 1602, Corneille Jansen, dit Jansenius, théologien hollandais, évêque d'Ypres, entre à l'Université de Louvain qui est alors le théâtre d'une lutte violente entre jésuites et Augustiniens pour lesquels il prend parti.

1603. Par l’édit de Rouen du 3 septembre, le roi Henri IV autorise les Jésuites à rentrer en France.

1604. 2 janvier, le Parlement autorise la réinstallation des jésuites dans le royaume de France. Henri IV a cédé aux instances du pape, aux prières du P. Cotton, son confesseur, malgré les conseils de Sully, à qui il déclara : « Ils (les jésuites, ndlr) seront bien plus dangereux encore, si je les réduis au désespoir. Me répondez-vous de ma personne, et ne vaut-il pas mieux s'abandonner une fois à eux que d'avoir toujours à les craindre ? »

1606
- Le 31 janvier, en Angleterre, Guy Fawkes et le jésuite Garnet, principaux instigateurs de la conspiration des Poudres (5 novembre 1605), sont exécutés ; les jésuites sont expulsés.
- Le pape ayant excommunié le doge et le sénat de Venise (qui ont emprisonné un chanoine sans le prévenir) et jeté l’interdit sur la ville, le doge expulse les jésuites qui ont pris parti pour le pape.

En 1607, le père Héribert Rosweyde (1569-1629), jésuite d’Anvers, dresse une liste de treize cents vies de saints. Il édite, en 1615, un important recueil de vies de saints moines des premiers siècles, les Vitae patrum.

1610
- 14 mai, Paris, rue de la Ferronnerie, François Ravaillac assassine Henri IV de 2 coups de couteau. Les jésuites reçoivent le cœur royal dans leur collège de La Flèche.
- A Loreto, les jésuites fondent la première reduccion chez les Guaranis du Paraguay.

Les réductions
Dans le Nouveau Monde (plus particulièrement dans les provinces sud-américaines), l’œuvre la plus importante que les jésuites ont réalisée est sans conteste l'établissement de missions appelées reducciones (réductions).
À la fin du XVIe siècle, les jésuites, partisans d’une colonisation douce, travaillent à l’établissement d’un grand nombre de missions habitées par des Indiens convertis par les missionnaires et constituant de petites communautés indépendantes sur le plan économique et politique.
Pendant près de 2 siècles, les jésuites gouvernent jusqu'à 38 villages d'Amérindiens, ce qui représente un total de 160 000 personnes environ.
Trente réductions guaranis partageant un territoire et une culture constituaient la province jésuite de Misiones, correspondant à la région frontalière entre le Paraguay, l'Argentine et le Brésil actuels. Quinze de ces réductions se trouvent en Argentine. Sept des anciennes missions qui forment aujourd'hui le circuit international des missions jésuites ont été déclarées patrimoine de l'humanité.
Ces réductions sont placées sous l'autorité spirituelle de prêtres jésuites qui savent ménager l'autorité temporelle des caciques. Les Amérindiens qui y vivent apprennent l'agriculture, la mécanique, le commerce et même la musique et le chant. Une petite armée est également formée pour défendre les villages. Fait unique dans le monde de ce temps, la peine de mort et la torture sont proscrites. Nantis d’une liberté quasi totale vis-à-vis des autorités civiles et ecclésiastiques, les jésuites représentent alors le pouvoir le plus important de la colonie.
Les communautés du Paraguay sont un modèle du genre ; la première est fondée à Loreto en 1610.
Ces réductions préservent l’identité culturelle des Guaranis, qui possèdent depuis une écriture et une riche littérature en guarani.
Mais cette liberté ne convient pas aux colons espagnols et portugais, qui cherchent des esclaves pour leurs plantations. À plusieurs reprises, les Guaranis et les jésuites doivent se défendre par les armes contre les bandes de trafiquants d’esclaves.
En 1750, par le traité de Madrid, le roi Ferdinand VI d’Espagne cède sept réductions du Paraguay au Portugal, en échange de la colonie du Sacramento (l’actuel Uruguay) ; les jésuites décident alors de soutenir les Guaranis dans leur révolte contre ce transfert. Le 10 février 1756, les Guaranis sont écrasés par les troupes portugaises et espagnoles coalisées à la bataille de Caibaté (Brésil). Les jésuites sont bannis du Paraguay par les Portugais qui exploiteront les Indiens.
Le 1er avril 1758, le pape Benoît XIV accepte que soit nommé un cardinal portugais recommandé par le gouvernement pour enquêter sur les jésuites.

1611. Dans De auxiliis, le pape Paul V ordonne que cesse la discussion sur la grâce qui oppose jésuites et dominicains.
L’efficacité de cette grâce est-elle due à la prédétermination divine sur la volonté humaine (thèse des Dominicains) ou à la conformité du décret divin à la prescience que Dieu a des libres décisions humaines (thèse des Jésuites) ?
Dans leur majorité, les congrégations penchent en faveur des Dominicains, mais Paul V juge plus sage de ne pas prendre de définition doctrinale sur ces questions ; il rappelle seulement la doctrine tridentine selon laquelle une motion divine est nécessaire au libre arbitre, sans préciser davantage la nature de cette motion.
Il interdit aux adversaires d’évoquer jamais ces questions disputées ; la défense pontificale devra être rappelée à plusieurs reprises aux théologiens : en vain, d’ailleurs, car la querelle allait recommencer autour de l’Augustinus de Jansénius.

1614. Dans un faux, les Monita secreta, dû à un ancien jésuite polonais, le supérieur général est censé donner les meilleures méthodes pour s’insinuer auprès des grands et capter les testaments des riches veuves. Réédité en France en 1761, ce pamphlet contribuera à accroître l’aversion envers les jésuites.

1616. Le jésuite espagnol, Pierre Claver, est ordonné prêtre dans la mission de Carthagène (Colombie). Se définissant comme l'esclave des esclaves, il passera toute sa vie parmi les noirs réduits en esclavage, à tenter de les aider et les libérer intérieurement par la foi. Il mourra le 8 septembre 1654. Il sera canonisé en 1888 par Léon XIII. "Il me faut ne rien désirer ici-bas, hormis ce que Jésus désira. Je dois sanctifier les âmes, souffrir et mourir pour leur salut" (Pierre Claver).

Le jésuite et théologien espagnol, Francisco Suárez (+1617) déclare : « Non seulement les justes, mais les pécheurs, les fidèles aussi bien que les infidèles, les baptisés comme les non-baptisés, ont chacun leur ange gardien ».

Le 25 mai 1622, le prêtre jésuite espagnol, Pedro Páez, meurt à Gorgora (Gondar) en terre éthiopienne. Le négus Susneyos écrit au provincial de Goa, Luís Cardoso : « Quand bien même ce document serait aussi large que le ciel, il ne suffirait pas à décrire le fruit de ses travaux, de son enseignement et de la renommée de ses vertus » (11 décembre 1623). Pietro Tacchi-Venturi, historien italien, compare le travail apostolique de Páez en Éthiopie à celui de Matteo Ricci en Chine. En 1632, Susneyos est contraint d'abdiquer en faveur de son fils, Fasilidas, qui rétablit l'orthodoxie comme religion d'État, interdit les autres formes de christianisme et expulse les Jésuites d'Ethiopie.

Le 30 mars 1624, départ d'Agra en Inde, du jésuite portugais Antonio de Andrade qui traverse la chaîne himalayenne par l'ouest et entre au Tibet ; en août, il est reçu dans la cité de Tsaparang par le roi de Gugé, lequel, intéressé par sa religion, l'autorise à fonder une mission et à construire une église en 1626.

Le 26 avril 1625, les premiers jésuites arrivent à Québec.

1631. Le jésuite allemand, Friedrich Spee von Langenfeld (1591-1635), publie anonymement son manuscrit Cautio Criminalis dans lequel il dénonce les procès en sorcellerie illégitimes et inhumains, la torture brutale et l’extermination systématique d’innocents : des malheureuses, qui n'ont de sorcières que le nom, sont arrêtées, emprisonnées, torturées et condamnées au bûcher que pour avoir été accusées par d'autres inculpés eux-mêmes soumis à d'effroyables tortures.
Quand il publie en 1632 une seconde version plus critique que la première, il perd la protection de la Compagnie de Jésus qu’il doit quitter.

1632. En Ethiopie, l’empereur Fasilidas persécute d'abord les jésuites, puis les descendants des Portugais et les Ethiopiens convertis.

1640
- Septembre : publication de l’Augustinus de Jansénius (+1638) qui pense exposer la doctrine d'Augustin sur la grâce, le libre arbitre et la prédestination. L’œuvre est combattue par les jésuites qui privilégient le libre arbitre à la prédestination soutenue par les gens de Port-Royal.
- Le 31 décembre : Jean-François Régis meurt d'épuisement au bourg de La Louvesc en Ardèche. Né à Fontcouverte dans l'Aude, il entra très tôt dans la Compagnie de Jésus dont il fut l'un des plus grands prédicateurs du 17ème siècle, parcourant le Velay, le Vivarais et le Forez, des régions très marquées par les Guerres de Religion.

Vers 1640, les jésuites gèrent plus de 500 collèges en Europe (plus de 650, un siècle plus tard) sans compter que l'ordre a la charge totale ou partielle de 24 universités et qu'il instaure plus de 200 séminaires et maisons d'études pour ses membres.
L'enseignement dispensé par les jésuites pendant la Contre-Réforme a pour objet de renforcer le catholicisme menacé par l'expansion protestante.
Les cours pour laïcs s'adressent surtout aux nobles et aux riches, même si l'ordre dirige des écoles techniques et, dans les pays de mission, des établissements scolaires pour les moins fortunés.

1642-1649. Les missionnaires jésuites, René Goupil, Isaac Jogues, Jean de La Lande, Jean de Brébeuf, Gabriel Lallemant, Charles Garnier, Noël Chabanel et Antoine Daniel, sont tués par les Iroquois.

Le 19 juin 1644, le jésuite François-Joseph Bressani, fait prisonnier par les Iroquois, à quelque distance des Trois-Rivières, entre la Rivière-du-Loup et Yamachiche, est amené captif dans leur pays où il endure alors tous les tourments du martyre ; réduit à l'esclavage, il est vendu aux Hollandais pour 250 francs.

Les bollandistes
En 1643, les jésuites, Jean Bolland (1596-1665), dit Johannes Bollandus, et Henskens Godefroid Henskens, dit Henschenius, publient à Anvers le premier volume des Acta sanctorum, recueils de vies de saints, sous forme de calendrier. Jean Bolland, jésuite et historien belge, est le fondateur de l'hagiographie moderne.
Un troisième jésuite, Daniel Papebroch, dit Papenbrochius (1628-1714), entre dans l’équipe en 1659. Plus encore que ses deux aînés, celui-ci applique une méthode critique qui fait l’admiration des contemporains. Cependant certaines affirmations de Papebroch suscitent une controverse avec les Bénédictins. Puis, quand il démolit les légendes relatives à l’origine de l’ordre des Carmes, ceux-ci expriment tant de réclamations qu’ils obtiennent la condamnation des Acta sanctorum par l’Inquisition espagnole, sentence non reprise par le Saint-Office.
En 1837, des jésuites belges reconstituent la Société des bollandistes.
A partir de 1876, le père Charles de Smedt (1831-1911) fait appliquer les principes de la critique moderne. Tous les textes concernant les saints sont édités avec leurs variantes et leurs remaniements de manière à permettre de faire non seulement l’histoire des saints, mais aussi celle de leur légende.

1645.
- Le jésuite allemand Johann Schall de l’institut de mathématique et d’astronomique de Pékin, facilite l’introduction du catholicisme en Chine.
- Dans son grand ouvrage sur la lumière, Ars magna lucis et umbrae (1646, 2e éd. augmentée 1671), le père Athanase Kircher décrit la projection des images sur un écran ; il représente pour la première fois une lanterne magique.

Le 16 juin 1654, en Suède, suite à un complot, la reine Christine abdique. Convertie secrètement au catholicisme le 24/12, elle part visiter l'Europe. Installée en 1657 à Rome, elle y fonde l’Académie des Arcades.
Passionnée d’alchimie et de science, en quête de la pierre philosophale, elle s’entoure de personnages illustres tels que le médecin et occultiste Giuseppe Francesco Borri, l’alchimiste Francesco Maria Sundstrom, le père jésuite Athanase Kircher, l’astronome Jean-Dominique Cassini et le marquis de Palombara 7.

De janvier 1656 à mai 1657, Blaise Pascal publie, sous le pseudonyme de Louis de Montalte, un ensemble de dix-huit lettres : Les Provinciales, ou Lettres escrites par Louis de Montalte à un provincial de ses amis et aux RR. PP. Jésuites sur le sujet de la morale et de la politique de ces Pères.
Pascal défend la cause janséniste et attaque les jésuites, en particulier la morale laxiste dont ils font preuve dans leur casuistique. Les lettres V à XVI s’en prennent à la casuistique religieuse et morale des jésuites, examinant en particulier de fort près la direction d’intention, cette doctrine qui permet d’excuser certaines infractions majeures, dont l’homicide, en arguant qu’elles n’ont pas été voulues par le criminel (Lettre VII). L’art d’adapter les lois morales aux cas délicats, la notion de probabilisme, qui permet de tout mêler et de tout défendre, la dévotion aisée, enfin, sont des choses ridicules fondées sur des équivoques qui permettent aux jésuites de régner sur les cœurs, de détourner les sacrements, et aussi d’élargir leur influence dans la sphère politique. Ce qu’il faut établir, c’est que les jésuites sont trop subtils, et que cette subtilité conduit à manipuler les notions les plus sacrées et à laisser les criminels en paix, puisqu’elle permettra qu’on tue pour se protéger du vol ou pour sauver son honneur... Il faut donc se protéger des jésuites, savoir affronter, par le rire, les libelles qu’ils font courir, répondre avec précision pour échapper à la calomnie, et dénoncer une religion qui n’est plus qu’une politique (Lettre X).
Les Provinciales sont mises à l'Index par le pape.

1662. Les théologiens se demandent si le chocolat rompt le jeûne ; les jésuites estiment que le chocolat pris à l'eau n’est qu’une simple boisson ; cette opinion est soutenue par le cardinal F.M. Brancaccio et le pape Alexandre VII rappelle que Liquidum non frangit jejunum (les boissons ne brisent pas le jeûne) : donc, boire du chocolat liquide ne rompt pas le jeûne. 6

Le 24 février 1684, menés par Manoel Beckman, les propriétaires des raffineries de l'Etat du Maranhão au Brésil se révoltent et capturent les indigènes qui sont sous la protection des Jésuites ; la Couronne portugaise réprime la rébellion en faisant exécuter les meneurs ; elle autorisera cependant l'esclavage des indigènes en 1685.

1693. Mgr Maigrot, de la Société des missions étrangères de Paris, vicaire apostolique en Chine, interdit l’usage du vocabulaire des jésuites ainsi que la vénération des ancêtres et de Confucius par les chrétiens.

À la fin du XVIIe siècle, Louis XIV finança sur sa cassette personnelle l’envoi de six jésuites à la Cour de l’empereur de Chine Kangxi, initiant des relations entre le royaume de France et le très lointain Empire du Milieu.

1704. Le Saint-Office ayant repris les positions de Mgr Maigrot, vicaire apostolique en Chine, Clément XI condamne les rites chinois, c’est-à-dire les adaptations ou accommodations des jésuites.

1706. Même condamnation des rites malabars en Inde.

1709. 31 août, à Vienne, décès d'Andrea Pozzo, jésuite et peintre italien, célèbre pour ses réalisations en trompe-l'oeil et sa maîtrise de la perspective. Ses oeuvres les plus remarquables sont la voûte de l'église Saint-Ignace de Loyola à Rome, mais aussi la voûte en trompe-l'oeil de l'église des Jésuites à Vienne.

1715
- Le 19 mars, la bulle Ex illa Die de Clément XI interdit les rites chinois chrétiens qui autorisent le culte des ancêtres et le confucianisme.
- Le 22 décembre 1715, Giuseppe Castiglione, né le 19 juillet 1688 en Italie, frère jésuite, missionnaire et peintre, arrive à Pékin. Il devient un des peintres préférés du roi appartenant à la Dynastie Qing. Il deviendra par la suite peintre à la cour impériale et vivra à Pékin jusqu'à sa mort en 1766.

Innocent XIII (1721-1724) est hostile aux jansénistes et aux jésuites.

Benoît XIII (1724-1730), tout en reprenant nettement à son compte les condamnations énoncées par la bulle Unigenitus, s’efforce d’écarter l’interprétation excessive qui ferait de ce document une officialisation du molinisme ; aussi approuve-t-il l’enseignement des augustino-thomistes sur la grâce efficace et la prédestination.

1736. Malgré le soutien de jésuites proches des Stuart, et malgré son célèbre discours visant à rattacher la maçonnerie aux ordres chevaleresques chrétiens de saint Jean de Jérusalem et du Temple, le Chevalier de Ramsay, fervent partisan des doctrines catholiques qu'il introduit autant qu'il le peut dans une nouvelle franc-maçonnerie, nommée jacobite ou catholique, ne parvient pas à orienter la franc-maçonnerie selon ses vœux.

11 juillet 1742 : la bulle Ex quo singulari providentia de Benoît XIV condamne l'action des jésuites en Chine, les trouvant trop chinois (trop bienveillants vis-à-vis du confucianisme). Rome exige des missionnaires partant pour l’Extrême-Orient un serment de fidélité à la bulle.

1748. De l'esprit des lois, écrit par Charles de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu, est publié anonymement à Genève. L’ouvrage (l'œuvre de sa vie qu'il a remaniée pendant 14 ans) a immédiatement un immense retentissement mais il est attaqué par les jésuites et les jansénistes qui critiquent violemment l’éloge de la religion naturelle. La faculté de théologie de Paris condamne l’ouvrage. Il est mis à l’Index par le pape.

1758
- Le 1er avril, le pape Benoît XIV accepte que soit nommé un cardinal portugais recommandé par le gouvernement pour enquêter sur les jésuites.
- Le 21 septembre, le prêtre jésuite italien, missionnaire au Brésil, Gabriel Malagrida, condamné par l'inquisition comme hérétique, est garrotté puis brûlé à Lisbonne.

3 septembre 1759, le marquis de Pombal, Premier Ministre du Portugal (qui, d’après l’historien Lennhoff, a été initié à la franc-maçonnerie, en 1744, dans une loge londonienne) décrète l’expulsion des jésuites du Portugal et de tout l'Empire (la rupture avec Rome a déjà été marquée par l’expulsion du nonce le 15 juin).

6 août 1761, à Paris, suite à la condamnation du père de La Valette pour faillite, les biens de la Compagnie de Jésus sont mis sous séquestre par le Parlement.

Le 23 avril 1762, avec l’aval du roi Louis XV, le Parlement de Paris, favorable aux jansénistes, aux gallicans et aux philosophes irréligieux mais hostile aux jésuites antijansénistes et ultramontains, supprime la Compagnie de Jésus perverse, pernicieuse, séditieuse, attentatoire, etc. Les jésuites sont expulsés de France.

1764. 26 novembre, un décret de Louis XV dissout la Compagnie de Jésus.

7 janvier 1765, par la bulle Apostolicum pascendi, Clément XIII approuve à nouveau l'Institut de la Compagnie de Jésus.

1767
- Le 29 janvier, un décret secret de Charles III expulse les jésuites d'Espagne : l'expulsion est réalisée de nuit le 2 avril.
- En mai, Louis XV (poussé par Choiseul, partisan de l’Encyclopédie) bannit les jésuites.
- Le 30 mai : l'ordre d'expulsion des Jésuites arrive en Nouvelle-Espagne : 2 200 jésuites sont chassés des colonies espagnoles d'Amérique. Fin des missions jésuites au Paraguay où le décret arrive le 7 juin, et en Californie (décembre).

En 1769, lors du conclave réuni pour l’élection du successeur de Clément XIII, les ambassadeurs des Bourbons (France, Espagne, Sicile, Parme) menacent d’exclusive tout papabile ne prenant pas l’engagement d’interdire l’ordre.

La bulle d’extinction
Le 21 juillet 1773, par le bref Dominus ac Redemptor (signifié au général des Jésuites le 16 août), Clément XIV se résigne, sous la pression des cours européennes (les Bourbons), à supprimer la Compagnie de Jésus.
L'histoire de la Compagnie de Jésus est marquée par la montée régulière des hostilités qu'elle a suscitées, surtout dans les pays catholiques, et plus particulièrement au Portugal, sous le marquis de Pombal.
C’est que les chefs d'État et gouvernants de ces pays ne supportent pas l’entier dévouement des jésuites à la seule autorité du pape, et le clergé (janséniste) leur reproche leur engouement trop ouvertement affiché pour les réformes ecclésiastiques, ainsi que leur art subtil de l’inculturation dans les pays de mission (Querelle des rites).
Après la bulle d'extinction de la Compagnie de Jésus, Laurent Ricci, général des jésuites, est conduit par ordre du pape au château Saint-Ange où on le tient enfermé sous prétexte de lui faire son procès. Tandis qu'on instruit ce procès (qui, selon l'expression d'un des juges, pourrait servir plutôt à sa béatification qu'à sa condamnation), frappé dans sa prison d'une maladie qu'il juge mortelle, il demande les derniers sacrements de l'Eglise, et avant de les recevoir, il prononce sa protestation (qu'il a écrite 3 mois auparavant) en présence du châtelain qui l'administre, du vice-châtelain, de son secrétaire dom Jean, de François Orlandi, ex-jésuite, du sergent Venini, du caporal Pianazza, des soldats Ebel, Pach, Pulcher, Egremann, Petara, Rebna, Giacchini, Ferri et Paolini, de 2 domestiques du châtelain, Camille et Pierre, de l'apothicaire et d'un galérien, qui tous accompagnent le Saint Sacrement dans sa chambre. La voici mot à mot :
« L'incertitude du temps où il plaira à Dieu de m'appeler à lui et la certitude que ce temps est proche vu mon âge avancé, la multitude, la longueur, la durée et la grandeur de mes souffrances, trop supérieures à ma faiblesse, m'avertissent de remplir par avance mes obligations pouvant facilement arriver que la nature de ma dernière maladie m'empêche d'y satisfaire à la mort. » (Ceci est écrit). « Ainsi (ce qui suit est écrit et est dit devant le saint viatique) me considérant sur le point d'être présenté au tribunal d'infaillible vérité et justice qui n'est autre que le tribunal divin, après une longue et mûre considération, après avoir prié mon Rédempteur très miséricordieux et mon juge terrible de ne pas permettre que je me laisse conduire par aucune passion, spécialement dans une des dernières actions de ma vie, sans aucune amertume de cœur et sans aucun autre motif ou fin vicieuse, mais uniquement parce que je juge être obligé de rendre justice à la vérité et à l'innocence, je fais les deux déclarations et protestations suivantes. La première : je déclare et proteste que la Compagnie de Jésus supprimée, n'a donné aucun motif à sa suppression. Je le déclare et le proteste avec cette certitude que peut moralement avoir un supérieur bien informé de son ordre. La seconde : je déclare et proteste que je n'ai donné aucun motif, pas même le plus léger, â mon emprisonnement. Je le déclare et le proteste avec cette souveraine certitude et évidence que chacun a de ses propres actions. Je fais cette seconde protestation uniquement parce qu'elle est nécessaire à la réputation de la Compagnie de Jésus éteinte dont j'étais le supérieur général. Du reste, je ne prétends point qu'en vertu de cette protestation, on puisse juger coupable devant Dieu, aucun de ceux qui ont nui à la Compagnie de Jésus et à moi, de même que je m'abstiens de semblable jugement. Les pensées de l'esprit et les affections du cœur humain n'étant connues que de Dieu seul, lui seul voit les erreurs de l'entendement, et discerne si elles sont telles qu'elles puissent excuser les fautes, lui seul pénètre les fins qui nous meuvent à agir, l'esprit avec lequel on opère, les affections et les mouvements du cœur dont l'action est accompagnée ; et puisque l'innocence ou le crime de l'opération extérieure dépend de tout cela, j'en laisse par conséquent tout le jugement à celui qui « in interrogabit opera, et cogitationes scrutabitur. Sap. 6,4 ». Et pour satisfaire au devoir de chrétien, je proteste d'avoir toujours, avec le secours divin, pardonné, et de pardonner sincèrement à tous ceux qui m'ont tourmenté et lésé, d'abord par les torts faits à la Compagnie de Jésus, par les manières dures dont on a usé envers les religieux qui la composaient, ensuite par son extinction et par les circonstances qui l'accompagnèrent, enfin par mon emprisonnement, par les duretés qu'on y a ajoutées, et par le préjudice de ma réputation qui en est inséparable. Je prie le Seigneur de pardonner à moi-même par sa pure pitié et miséricorde et par les mérites de Jésus-Christ, la multitude de mes péchés, ensuite de pardonner à tous les auteurs et coopérateurs des maux et torts susdits ; et je veux mourir avec ce sentiment et cette prière dans le cœur. » (Ici finit ce qui est dit en présence du saint Viatique). « Enfin, je prie et conjure quiconque verra ces déclarations et protestations, qui sont les miennes, de les rendre publiques à tout le monde, autant qu'il le pourra ; je l'en prie et l'en conjure par tous les titres de l'humanité, de la justice et de la charité chrétienne, qui peuvent l'engager à remplir mes dernières volontés qui sont celles-ci. Laurent Ricci. »
Nous croyons important de ne pas passer sous silence ce que M. Proyart nous atteste avoir recueilli de la bouche même de Pie VII, au sujet de la destruction des jésuites, dans l'édition qu'il a donnée de l'Histoire abrégée de l'Eglise par M. L'homond : « Nous tenons, dit-il, de la bouche même de Pie VII, relativement à la destruction des jésuites, la confirmation des traits suivants : 1 ° Que le ministère le plus ardent à la poursuite de cette injustice fut celui d'Espagne ; 2° que la promesse que fit Clément XIV au ministre d'Espagne, de détruire ces religieux, fut postérieure à son exaltation ; 3° qu'une fois cette fatale promesse donnée, le ministre ne cessa d'en réclamer l'exécution ; 4° que ce fut au moment même où le pontife signa le bref d'extinction, qu'il fut saisi de l'esprit d'inquiétude qui continua de l'agiter et de le poursuivre jusqu'au tombeau. Ce fait, nous dit le Saint-Père, me fut confirmé par le prélat domestique qui présenta la plume à Clément XIV pour la signature du bref. ».
Laurent Ricci meurt en prison en 1775.
Le roi de Prusse, Frédéric II, et l’impératrice de Russie, Catherine II, qui admirent tous deux l’éducation et l’érudition des jésuites, refusent de donner à la bulle d’extinction la diffusion nécessaire. Dans ces pays, l’ordre survit sous la forme d’organisations locales jusqu'à son rétablissement en 1814.

Le 22 septembre 1774, le pape Clément XIV meurt à Rimini. On dit qu’il a été empoisonné au moyen d'une serviette ou par l’officier dégustateur chargé de tester les mets. On pense, sans preuve, à une vengeance des jésuites, mais une commission médicale internationale constate l’absence de poison.

Le 7 mars 1801, par le bref Catholicae fidei, Pie VII approuve l'existence de la Compagnie de Jésus en Russie et autorise la Compagnie à élire un Supérieur général pour la Russie.

En 1813, les jésuites sont expulsés de Saint-Pétersbourg et de Moscou, puis, en 1820, de toute la Russie.

Rétablissement de la Compagnie
Le 7 août 1814, le pape Pie VII rétablit la Compagnie de Jésus par la bulle Sollicitudo omnium ecclesiarum.
Les jésuites, rappelés en Espagne par Ferdinand VII, sont chassés en 1820, et expulsés de nouveau en 1835.
D'abord tolérés en France sous le nom de Pères de la foi, les jésuites y sont rétablis légalement en 1822.

Le 16 juin 1828, la France interdit l’enseignement aux jésuites ; le nombre d’élèves est limité dans les séminaires. Léon XII approuve les mesures prises par le gouvernement français contre les jésuites.

1830. Triomphe de l’anticléricalisme romantique (exemple : Stendhal) : les prêtres doivent être écartés de la vie sociale car ils sont laids, bêtes et méchants. Le gallican Montlosier, les historiens Michelet et Quinet, le romancier Eugène Sue s’attaquent au jésuite, l’homme noir par excellence.
Les jésuites sont proscrits et partent inaugurer des missions au Liban et aux Etats-Unis.

1843. Jules Michelet : Etude sur les jésuites.

Le 8 décembre 1844, le gouvernement fédéral suisse, poussé par les radicaux, envoie l’armée contre le canton catholique de Lucerne (qui veut rouvrir les couvents et confier les collèges aux jésuites) mais échoue.

1845. En France, Thiers demande au gouvernement d’expulser les jésuites. Grégoire XVI y consent. Le 6 juillet, Le Moniteur note que les jésuites cessent d'exister en France.

Le gouvernement fédéral suisse bannit les jésuites du territoire en 1847.

Pie IX, au début de son pontificat (1846-1878), montre peu de sympathie pour les jésuites ; en 1848, il les renvoie de Rome, en même temps qu'ils sont contraints de quitter le reste de l'Italie et l'Autriche.

1849. Victor Hugo, sans attaquer la papauté, dénonce le danger des gouvernements cléricaux : le jésuitisme est l’ennemi de la liberté.

1872
- 14 mai : en Allemagne, une loi introduite par Bismarck interdit les congrégations religieuses, particulièrement les jésuites qui sont expulsés le 10 juillet.
- La même année, les jésuites sont chassés du Guatemala, du Nicaragua et du Salvador.

En Suisse, la Constitution de 1874 porte interdiction aux jésuites de s’établir sur le territoire de la Confédération.

1880
- 29 mars, en France, décret imposant aux jésuites d’évacuer leurs établissements scolaires dans les 3 mois.
- 30 mars, décret invitant les congrégations religieuses non autorisées à régulariser dans les 3 mois (5 000 jésuites, bénédictins et carmélites quittent la France).

En 1922, Pie XI proclame que les Exercices spirituels de saint Ignace sont le code spirituel le plus sage et le plus universel pour diriger les âmes sur le chemin du salut et de la perfection.

En 1939, Pie XII autorise les chrétiens de Chine à utiliser leur langue dans les services religieux ; il permet le culte des ancêtres et le confucianisme et reconnaît que les rites funéraires chinois n’ont pas de caractère religieux. Si l’Eglise avait adopté en temps utile la méthode des Jésuites, peut-être la Chine serait-elle devenue chrétienne au XVIIIe siècle ?

Hermann Rauschning, ancien chef national-socialiste du Gouvernement de Dantzig, confie 2 : "J’ai surtout appris de l’Ordre des Jésuites, m’a dit Hitler... Jusqu’à présent, il n’y a jamais rien eu de plus grandiose sur la terre que l’organisation hiérarchique de l’Eglise catholique. J’ai transporté directement une bonne part de cette organisation dans mon propre parti... Je vais vous livrer un secret. Je fonde un Ordre (La Schutzstaffel dite SS créée en 1925, ndlr)... Dans mes Burgs de l’Ordre, nous ferons croître une jeunesse devant laquelle le monde tremblera... Hitler s’arrêta et déclara qu’il ne pouvait en dire davantage..."
Walter Schellenberg rapporte 3 : "L’organisation des SS avait été constituée par Himmler suivant les principes de l’Ordre des Jésuites. Les règlements de service et les Exercices spirituels prescrits par Ignace de Loyola constituaient un modèle que Himmler chercha soigneusement à copier... Le Reichsführer SS - titre de Himmler comme chef suprême des SS - (6 janvier 1929, ndlr) devait correspondre au "Général de l’Ordre des Jésuites" et toute la structure de la direction était calquée sur l’ordre hiérarchique de l’Eglise catholique."

Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955), savant, philosophe et théologien français, entré dans la Compagnie de Jésus en 1899, ordonné prêtre en 1911, enseigne la géologie et la paléontologie à l’Institut catholique de Paris de 1920 à 1923. De 1923 à 1946, il parcourt l’empire chinois (à partir de 1929, il participe aux fouilles de Chou-hou-tien, près de Pékin, où fut découvert le sinanthrope), l’Inde, la Birmanie, Java et participe en 1931-32 à ce qu’on a appelé la Croisière jaune. À partir de 1951, il est attaché à la Wenner-Gren Foundation de New York, qui, en 1951 et 1953, le charge de superviser et de financer les recherches anthropologiques en Afrique du Sud. Ses recherches d’anthropologie l’ont amené à concevoir toute une théorie évolutionniste : sa philosophie vitaliste cherche à penser la continuité entre la nature et la vie, puis entre la vie et l’esprit. Cette recherche le rapproche du matérialisme dialectique comme science de la nature et de son histoire. Teilhard de Chardin ordonne toute l’évolution non seulement à la réalisation de l’homme (comme espèce animale supérieure aux autres espèces), mais à celle d’un homme particulièrement spiritualisé, dont le Christ, selon lui, représente la vivante image. En d’autres termes, l’évolutionnisme de Teilhard de Chardin n’est pas qu’une théorie de l’évolution des espèces les plus basses jusqu’à l’homme, c’est aussi une philosophie de l’histoire, qui assigne à l’homme le devoir de réaliser l’ultrahumain, c’est-à-dire une vie purement spirituelle, l’idéal du Christ. Cette continuité entre une théorie de la vie (biosphère) et une théorie de l’esprit (noosphère) n’est pas sans évoquer la philosophie de Bergson (les Deux Sources de la morale et de la religion). La philosophie de Teilhard de Chardin a secoué certains milieux chrétiens en montrant qu’une recherche scientifique, de style nettement matérialiste, portant sur l’histoire de la nature, n’est pas exclusive de la foi. On lui doit notamment : Le Phénomène humain (1938-1940), Le Cœur de la matière (1950), Le Christique (1955). "Pourquoi donc, homme de peu de foi, craindre ou bouder les progrès du monde ? La véritable attitude chrétienne, c’est tout essayer pour le Christ. Diviniser n’est pas détruire, mais sur-créer." (Pierre Teilhard de Chardin, Hymne à l’univers). "Si Teilhard a été apprécié en 1955 pour l'exaltation qu'il faisait de l'homme, « axe et flèche de l'évolution », on minimise aujourd'hui cet anthropocentrisme et on met en avant le fait qu’il s'est intéressé à « La Place de l'Homme dans la Nature », avec une vision cosmique" (Mercè Prats).

En juin 1981, le père Pedro Arrupe, général des jésuites, prend parti pour le clergé sud-américain qui cherche un contact avec le marxisme.

En mars 2007, la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF) se voit obligée de communiquer que les œuvres mentionnées (Jesucristo Liberador. Lectura histórico-teológica de Jesús de Nazaret et La fe en Jesucristo. Ensayo desde las víctimas) du Père jésuite Jon Sobrino (l’un des fondateurs de l’Université centraméricaine de San Salvador, connu pour ses écrits sur la théologie de la libération dont il est l’un des principaux représentants) présentent, dans certains points, de significatives discordances par rapport à la foi de l’Église et que celui-ci s’écarte de la foi chrétienne sur des points aussi cruciaux que la divinité de Jésus-Christ ; l’incarnation du Fils de Dieu ; la relation entre Jésus-Christ et le fils de Dieu ; l’auto conscience de Jésus-Christ et la valeur salvifique de sa mort.
L’Eglise ne reproche pas à Sobrino son engagement social aux côtés des plus pauvres, mais ses opinions à propos de Jésus-Christ, car le christianisme ne repose pas sur des valeurs mais sur la foi en la personne de Jésus-Christ.
L'Ordre est complètement en accord avec tout ce qu'a écrit Sobrino, souligne le Père Jose de Vera, porte-parole du Conseil général des jésuites.
La Faculté théologique catholique de Graz (Autriche) apporte son soutien au père Sobrino, estimant qu'il représente un exemple lumineux pour l'Eglise. 4

Dans une lettre du 10 janvier 2008, le pape Benoît XVI demande à la Congrégation Générale des Jésuites, réunie pour élire le prochain pape noir : « Pour offrir à l'entière Compagnie de Jésus une orientation claire qui soit un soutien pour un dévouement apostolique généreux et fidèle, il pourrait donc être fort utile que la Congrégation Générale réaffirme, dans l'esprit de saint Ignace, son adhésion totale à la doctrine catholique, en particulier sur des points névralgiques fortement attaqués aujourd'hui dans la culture séculière, comme par exemple le rapport entre le Christ et les religions, certains aspects de la théologie de la libération, et divers points de la morale sexuelle, surtout pour ce qui regarde l'indissolubilité du mariage et la pastorale des personnes homosexuelles

Le 12 mars 2008, à l'issue de la 35ème congrégation générale des jésuites, le père Adolfo Nicolás, nouveau supérieur général de la Compagnie de Jésus (qui compte alors 18 500 jésuites), explique le rapport entre les jésuites et le pape : “Nous ne sommes pas une église dans une église, comme disent parfois certains.. nous sommes une petite portion de l’Eglise, toute petite, encore plus petite qu’il y a 20 ans, mais au service d’une mission que nous estimons très importante. Le Pape est au cœur de notre rapport avec l’Eglise, donc ce n’est pas quelqu’un qui est en plus, quelqu’un qui est là, un supérieur. Mais c’est quelqu’un qui est au cœur de notre rapport avec l’Eglise, le symbole de notre union avec le Christ. Il est le garant de notre mission.”

Le 13 mai 2008, dans un entretien paru dans l'Osservatore Romano, le père jésuite José Gabriel Funes, directeur de l'Observatoire du Vatican à Castel Gandolfo, déclare : "Croire en Dieu est compatible avec la croyance aux extra-terrestres (...) Comme astronome je continue à croire que Dieu est le créateur de l'univers (...) De même qu'il existe une multiplicité de créatures sur terre, il pourrait y avoir d'autres êtres, également intelligents, créés par Dieu". Le jésuite avance que si d'autres êtres intelligents existent, il n'est pas dit qu'ils aient besoin de la rédemption. Peut-être sont-ils restés dans la pleine amitié avec leur Créateur sans avoir commis le péché originel. Dans le cas contraire, l'incarnation, la venue sur terre du Christ, Fils de Dieu et Dieu incarné pour racheter les péchés des hommes, vaut aussi pour eux, car l'incarnation est un événement totalement unique.

En 2009, Benoît XVI fait adresser un message à Mgr. Claudio Giuliodori, évêque de Macerata, Tolentino, Recanati, Cingoli et Treia (Italie), à l'occasion du IVe centenaire de la mort du jésuite Mateo Ricci (Pékin, 11 mai 1610) célébré dans son diocèse. Le pape écrit que Mateo Ricci, né à Macerata le 6 octobre 1552, doté d'une foi profonde et d'un génie culturel et scientifique extraordinaire, a passé de longues années de son existence à tisser un dialogue profitable entre l'Occident et l'Orient, en menant, en même temps, une action incisive d'enracinement de l'Evangile dans la culture du grand peuple de Chine. Son exemple est encore aujourd'hui un modèle de rencontre entre les civilisations européenne et chinoise.

Au 1er janvier 2013, les jésuites sont 17 287 ; on compte 12 298 prêtres, 1 400 frères, 2 878 scolastiques et 711 novices 9.

Le mercredi 13 mars 2013, le cardinal argentin Jorge Mario Bergoglio, est élu pape et choisit le nom de François en référence à st François d'Assise. C'est le premier pape issu de la Compagnie de Jésus.
Le 17 décembre, le pape déclare saint le jésuite français Pierre Favre (1506-1546), originaire de Savoie et ami du fondateur de la compagnie de Jésus, Ignace de Loyola.

Le 1er septembre 2016, les Jésuites de France publient Face aux situations d'abus sexuels – Prévention et actions, un plan de lutte contre la pédophilie, consultable en ligne sur le site des jésuites, qui expose de façon précise les comportements à adopter, ou à éviter dans certaines situations délicates.

Le 31 mars 2023, les évêques de France, réunis en assemblée plénière à Lourdes, votent en faveur d’une éventuelle procédure en vue de la béatification du jésuite Henri de Lubac (1896-1991), grande figure de la théologie au XXe siècle et fréquemment cité par le pape François. Le cardinal Henri de Lubac, entré dans la Compagnie de Jésus en 1913, fut expert au concile de Vatican II. Il a été un artisan de la redécouverte des Pères de l'Église, et son travail théologique exerce une profonde influence.

Le 23 août 2023, le gouvernement nicaraguayen annonce révoquer le statut juridique de l’ordre religieux des Jésuites, et confisquer ses biens mobiliers et immobiliers.


CITATIONS

L'homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur ; et par là sauver son âme. Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l'homme, pour l'aider à poursuivre la fin pour laquelle il est créé. Il s'ensuit que l'homme doit en user dans la mesure où elles lui sont une aide pour sa fin, et s'en dégager dans la mesure où elles lui sont un obstacle. Pour cela, il faut nous rendre indifférents à toutes les choses créées, en tout ce qui est permis à la liberté de notre libre arbitre et ne lui est pas défendu. De telle manière que nous ne voulions pas, quant à nous, santé plus que maladie, richesse plus que pauvreté, honneur plus que déshonneur, vie longue plus que vie courte, et ainsi de tout le reste ; mais que nous désirions et choisissions uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés. (Ignace de Loyola +1556, Exercices Spirituels, Principe et fondement)

Souvent la pensée me vient d’aller dans les écoles de chez nous, criant à pleine voix, comme un homme qui a perdu le jugement, et surtout à l’université de Paris. En Sorbonne, je voudrais répéter à tous ceux qui possèdent plus de science que de volonté de tâcher d’en tirer parti. Que d’âmes ne connaissent pas le chemin de la gloire et vont en enfer à cause de votre négligence ! (François Xavier 1506-1552, Lettre aux Pères de Rome).

Croyez ceci : si l’on a dans le cœur l’amour du Christ crucifié, alors en cette vie, rien n’est vraiment pénible. Quand vous voyagez pour lui, il ne vous manquera point, lui qui est le guide fidèle, le gardien de vos pas. Il est celui qui n’abandonne jamais les siens à l’heure où il les laisse provisoirement en butte au mépris du monde. (Pierre Canisius 1521-1597, Lettre à un ami de Hollande)

Dieu vous a placés dans l’opulence pour être les ministres de sa providence et les économes des miséreux. (Jean-François Régis, + 1640, à des riches)

Cher ami, ce n’est pas à vous, c’est à moi de vous remercier. Pardonnez-moi d’avoir songé si tard à vous secourir. (Jean-François Régis à un malade)

Les jésuites sont des gens qui allongent le Symbole et raccourcissent le Décalogue (Abbé Boileau 1648-1704).

Pour exprimer une grande imposture, les Anglais disent : « Cela est jésuitiquement faux » (Montesquieu 1689-1755).

Croyez-vous à la lettre de M. d'Ossun lue en plein conseil, et qui marque que les jésuites avaient formé le complot d'assassiner, le jeudi saint, bon jour, bonne oeuvre, le roi d'Espagne et toute la famille royale ? (Jean le Rond d'Alembert, Lettre à Voltaire, 4 mai 1767)

Les Jésuites ont eu comme tous les autres ordres, des casuistes... ; mais, de bonne foi, est-ce par la satire ingénieuse des Lettres provinciales que l’on doit juger de leur morale ? C’est assurément par Bourdaloue..., par leurs missionnaires. Rien de plus contradictoire que d’accuser de morale relâchée des hommes qui mènent en Europe la vie la plus dure et qui vont chercher la mort au bout de l’Asie et de l’Amérique. (Voltaire 1694-1778, Le Siècle de Louis XIV)

La Police et les Jésuites ont la vertu de ne jamais abandonner ni leurs ennemis ni leurs amis. (Honoré de Balzac 1799-1850, Une ténébreuse affaire)

Les charlatans de la jésuitière disent que l'homéopathie est la médecine spiritualiste. (Proudhon 1809-1865)

Le jésuitisme a compromis le catholicisme. (Quinet 1803-1875)

Le jésuitisme, passé maître en fait de transactions, a renoncé depuis longtemps à heurter de front les tendances modernes. (Guéroult 1891-1976)


Pour en savoir +
http://www.jesuites.com/


Notes
1 Agence Fides
2 Hermann Rauschning, ancien chef national-socialiste du Gouvernement de Dantzig, Hitler m’a dit, Ed. Coopération, Paris 1939, pp. 266, 267, 273 ss.
3 Walter Schellenberg, Le Chef du contre-espionnage nazi vous parle, Julliard, Paris 1957, pp. 23-24.
4 Sources : Service de presse du Vatican et Agence Apic
5 http://www.jesuites.com/
6 Le Chocolat - Pour la petite histoire, meileurduchef.com
7 http://www.melmothia.net/3145/la-porta-magica/
8 http://www.eglise.catholique.fr/saint-du-jour/06/02/
9 https://www.jesuites.ch/jesuites/identite/compagnie-dans-le-monde/en-chiffres-et-en-cartes


Sources


Auteur : Jean-Paul Coudeyrette
Référence publication : compilhistoire.fr ; reproduction interdite sans l'autorisation de l'auteur.

Date de mise à jour : 09/04/2024

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